Salomé, à une vingtaine de kilomètres de Lille, à la limite de l’ex-bassin houiller du Pas-de-Calais. Population : 3.000 habitants. Dont une dizaine de voyous… qui font leur loi. C’est la gueule de bois pour les villageois qui croyaient ce genre de mauvais sort réservé aux cités difficiles des banlieues sensibles. Car depuis l’élection du maire, Philippe Amielh (PS), en 2008, les dégradations dans le village se sont multipliées. Avec comme point d’orgue, début septembre, une rixe entre deux bandes rivales qui s’est soldée par des tirs de carabine. Décision du tribunal de Lille : 18 mois de prison pour le jeune tireur, originaire d’Haubourdin, un bourg voisin. « A Salomé, les gens ont en marre, explique Philippe Amielh. Ma crainte, c’est qu’à force de provocations, un habitant excédé en arrive à tirer un coup de fusil… »
Le jardin des poètes
Pour comprendre la mainmise de la petite bande sur ce bourg rural, il faut remonter le long des rues parsemées de maisons de briques rouges. Direction d’abord le « jardin des poètes ». Canettes qui jonchent le sol et tapage nocturne étaient ici le lot quotidien des riverains. Quelque temps après son élection, l’édile a réagi en pondant un arrêté d’interdiction de fréquentation du parc passé 21 heures. Aussitôt, les voyous « déménagent » place Bocquet, à côté de l’école. Ils y trouvent un Abribus, pratique pour s’abriter lorsqu’il pleut. Mais là aussi, les riverains sont tout sauf ravis de leurs nouveaux voisins. Les beuveries durent toute la nuit, sans compter les insultes. « Leurs passions, ce sont les joints et l’alcool, regrette le maire. Je veux bien faire un local, mais pas avec un bar à whisky et un fumoir. » L’Abribus est finalement démonté. La petite bande qui empoisonne la vie villageoise se rabat alors vers le porche de l’église. Là, sur des contreplaqués qui protègent tant bien que mal les portes du lieu de culte, les tags fleurissent. Le nom de la bande, « 59456 », et des insultes, contre la police et le maire.
Entre l’édile et la dizaine de voyous, c’est désormais la guerre ouverte. Les animaux de la famille Amielh ont été empoisonnés. Fin 2008, un des adjoints du maire a été agressé. En outre, Philippe Amielh a reçu des menaces de mort, subi un vol de voiture, un cambriolage et une tentative de cambriolage. Fin juin, un incendie a carrément été allumé dans son jardin.
Il n’est pas le seul à faire les frais de la bande. « On n’ose plus trop sortir, se lamente Gaëtan, un riverain de 24 ans. Une fois qu’ils sont réveillés, en début d’après-midi, il faut faire attention où l’on marche, sinon on se fait insulter. » Pour d’autres, dont ce patron de bar, « ce qui a déclenché les choses, c’est un manque de respect et de psychologie vis-à-vis de la jeunesse ».
Des procédures trop lourdes
Quoi qu’il en soit, début septembre, le maire a contre-attaqué en dénonçant un abandon de l’Etat. Dans la foulée, il a cumulé les rendez-vous en gendarmerie et en préfecture pour réclamer de « la fermeté et de la prévention ». « Tous les jeunes responsables des méfaits ont été condamnés, ils ont désormais une épée de Damoclès sur la tête avec la récidive, ils savent ce qui les attend », assurent les militaires qui notent, chiffres en main, que la délinquance est en baisse par rapport à l’année dernière. Pas sûr toutefois que cela suffise à rassurer Philippe Amielh, qui déplore « des procédures trop lourdes » pour lutter contre l’alcoolisation sur la voie publique. Et lance un appel aux députés : changer la loi pour pouvoir infliger des amendes, « ce qui aurait l’avantage de donner une sanction immédiate ». Pour le moment, c’est la seule solution qu’il ait trouvée pour que Salomé retrouve la tranquillité.
http://www.francesoir.fr/faits-divers/dans-le-pas-de-calais-salome-c-est-le-far-west.24070
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