lundi 19 décembre 2011

Les derniers soldats américains ont quitté l'Irak

Le dernier convoi de militaires américains quittant l'Irak a franchi la frontière koweïtienne tôt dimanche matin, mettant un point final au retrait des Etats-Unis près de neuf ans après l'invasion du pays pour chasser Saddam Hussein du pouvoir. Alors que les camions approchaient la frontière, l'excitation a commencé à s'emparer des soldats. Beaucoup n'avaient pas dormi les dernières 24 heures en attendant l'heure de départ. "Je suis trop impatient d'appeler ma femme et mes enfants pour leur dire que je suis sain et sauf", s'est écrié un sergent-chef en apercevant les fils barbelés marquant la frontière. Certains soldats applaudissaient visiblement soulagés. "C'est agréable de savoir que c'est notre dernière mission ici. Nous écrivons une page d'histoire, vous savez, nous sommes les derniers à partir", s'exclamait l'un d'eux. Mais les soldats se demandaient aussi comment les Irakiens réagiraient en découvrant que les Américains étaient partis. "Ils vont se réveiller ce matin et s'apercevoir qu'il n'y a plus personne", commentait un militaire, Irakien qui avait émigré aux Etats-Unis en 2009 avant de s'enrôler dans l'armée un an plus tard.


C'est vers 7h30, heure locale que ces 110 véhicules transportant environ 500 soldats, appartenant en grande majorité à la 3ème brigade de la 1ère division de cavalerie, ont officiellement quitté le territoire irakien. Il y a huit ans et neuf mois, les forces américaines avaient franchi cette même frontière dans l'autre sens lors de l'opération Iraqi Freedom (Opération Liberté irakienne) qui devait devenir la guerre la plus controversée de l'histoire américaine depuis celle du Vietnam près d'un demi-siècle plus tôt. L'armée américaine, qui a compté jusqu'à 170.000 hommes au plus fort de la lutte contre l'insurrection, a abandonné 505 bases en Irak. Désormais, il ne reste plus dans ce pays que 157 soldats américains chargés d'entraîner les forces irakiennes et un contingent de Marines pour protéger l'ambassade à Bagdad.

Tensions politiques

Face au refus de l'Irak d'accorder l'immunité à des milliers de soldats américains chargés de poursuivre la formation, le président Obama avait décidé, le 21 octobre, le retrait total des troupes. La dernière escouade a quitté dans la nuit de samedi à dimanche le camp de l'imam Ali pour les Irakiens et Adder pour les Américains près de Nassiriya, dans le sud. Les Américains laissent derrière eux un pays plongé dans une crise politique, avec la décision du bloc laïc Iraqiya de l'ancien Premier ministre Iyad Allaoui, de suspendre à compter de samedi sa participation aux travaux du Parlement.

Second groupe parlementaire avec 82 députés contre 159 à l'Alliance nationale, coalition des partis religieux chiites, ce parti dresse un réquisitoire contre la politique du Premier ministre Nouri al-Maliki. "Iraqiya refuse la politique consistant à oeuvrer en ignorant les autres partis, la politisation de la justice, l'exercice solitaire du pouvoir, la violation de la loi", assure le communiqué. "Cette manière d'agir pousse les gens à vouloir se débarrasser de la main de fer du pouvoir central d'autant que la Constitution les y autorise", faisant allusion aux récents votes en faveur de l'autonomie des provinces à majorité sunnite d'Anbar, Salahedinne et Diyala. S'estimant lésés par le gouvernement à majorité chiite, les sunnites, jadis partisans d'un état centralisé, sont aujourd'hui portés par un mouvement centrifuge à vouloir gérer leurs régions de manière autonome, comme les Kurdes, ce qui comporte un risque d'éclatement du pays.

Si l'Irak exporte environ 2,2 millions de b/j, lui rapportant 7 milliards de dollars par mois, les services de base comme la distribution d'électricité et l'eau potable sont toujours défectueux. Désormais, les 900.000 éléments des forces irakiennes auront la lourde tâche d'assurer seuls la sécurité du pays alors que les insurgés, notamment Al-Qaïda, bien qu'affaiblis, peuvent encore faire couler le sang. Ils devront aussi empêcher la résurgence des milices et une réédition d'une guerre confessionnelle entre chiites et sunnites qui avait des dizaines de milliers de morts en 2006 et 2007. Et deux autres dangers menacent le pays : la crise en Syrie entre sunnites et alaouites ainsi que l'influence grandissante de l'Iran qui pourrait conduire à des conflits internes.

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