jeudi 30 mai 2013

Affaire Bettencourt : le juge et l'experte, une amitié qui pourrait fragiliser l'enquête

Le Parisien révèle jeudi que l'un des experts, nommés par le juge Gentil pour examiner l'état de santé mentale de Liliane Bettencourt, était son témoin de mariage. Une proximité dont les avocats de Nicolas Sarkozy, notamment, devraient se servir pour mettre à mal toute la procédure en cours.

Au lendemain de la mise en examen de Nicolas Sarkozy pour abus de faiblesse envers l'héritière de L'OréalLiliane Bettencourt, ses proches avaient promis qu'ils auraient la peau du juge, auteur de cette "injustice". Le Parisien vient de leur fournir une arme sur un plateau. Dans son édition de jeudi, le quotidien affirme en effet que le juge Gentil serait un ami proche de l'une des expertes ayant conclu à l'état de faiblesse de l'héritière de L'Oreal, en l'occurrence Sophie Gromb, chef du service de médecine légale au CHU de Bordeaux. Celle-ci avait participé à l'expertise déterminante sur l'état de santé mentale de Liliane Bettencourt en juin 2011. Selon le quotidien, l'experte aurait été témoin du mariage du magistrat bordelais à Mérignac en 2007.

Même si Sophie Gromb n'était pas seule pour expertiser l'octogénaire -quatre autres experts, dont un psychologue et deux neurologues étaient également présent le jour de l'examen au domicile de Liliane Bettancourt. Même si elle est réputée d'un grand professionnalisme, tout comme le magistrat, la nouvelle jette quand même un froid. Et pose la question fondamentale de l'impartialité des deux protagonistes et, du même coup, de la validité de l'expertise qui a entraîné les mises en examen. Le Parisien assure que le jour de la fameuse expertise, Sophie Gromb serait restée seule 35 minutes avec le juge Gentil et Liliane Bettencourt, dans la chambre de celle-ci à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine), avant que les quatre autres experts ne les rejoignent. Sur le moment, la défense avait contestée les conditions dans lesquelles cette expertise avait été menée, au saut du lit et sans préavis sur une très vieille dame.
Ce doute sur l'impact de leur proximité s'épaissit, estime le Parisien, au regard du devis faxé par Sophie Cromb au juge Gentil quelques semaines après l'expertise dans lequel le médecin estime ses frais d'honoraires "entre 4.000 et 7.000 euros HT", ce qui serait sept fois plus élevé que le tarif de base alloué aux experts, à savoir 460 euros. Selon plusieurs juristes interrogés par le quotidien "si, sur le plan pénal, rien n'interdit formellement à un juge d'instruction de désigner un ami comme expert, une telle désignation constitue, a minima, une faute déontologique de la part du juge".
 
"Exceptionnelle gravité" 
Ces révélations tombent à un moment  crucial de l'affaire Bettencourt. C'est en effet dans huit jours que la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux se prononcera sur les requêtes en nullités formulées notamment par les avocats de Nicolas Sarkozy. Autant dire que ces derniers devraient s'en donner à cœur joie au cours des prochains jours pour discréditer l'enquête du juge. "Si ces faits sont avérés, ils sont d'une extrême gravité", s'est d'ailleurs empressé de commenter Me Thierry Herzog, avocat de l'ancien chef de l'Etat. "Il appartiendra au procureur de la République de vérifier ces informations, indique-t-il. Si elles étaient confirmées, nous envisagerons, avec l'ensemble des confrères, des initiatives judiciaires".
"Tout le dossier d'abus de faiblesse repose sur ce document, insiste pour sa part Pierre Haïk, l'avocat de Patrice de Maistre qui se dit "totalement abasourdi" par ces informations. "Si ces informations sont vérifiées, nous nous trouverions face à une situation inédite d'une exceptionnelle gravité", a-t-il insisté jeudi matin sur LCI. "Bien sur que ça pourrait changer la donne", conclut-il.
 

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