dimanche 20 novembre 2011

Syrie : l'ultimatum s'achève dans un bain de sang

Hillary Clinton a ajouté vendredi la voix de l'Amérique à celles, de plus en plus nombreuses, qui craignent que la longue répression en Syrie ne débouche sur une guerre civile. Pour la première fois, elle a évoqué sur la chaîne américaine NBC la possibilité d'un tel conflit "sinon dirigé, du moins certainement influencé par des déserteurs de l'armée", avec "une opposition très déterminée, bien armée et finalement bien financée". Des propos qui contrastent avec la prudence jusqu'alors observée par Washington. L'administration américaine avait contesté, jeudi encore, le risque de "guerre civile" évoqué par le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov. Autre fait significatif de l'évolution de la manière dont les Occidentaux considèrent la situation syrienne : le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague, doit avoir lundi à Londres des entretiens avec des dirigeants de la rébellion syrienne. Après des mois de contacts en coulisse, il s'apprête donc à recevoir au grand jour des représentants du Conseil national syrien et de la Commission nationale de coordination pour le changement démocratique.
Pour leur part, la France et la Turquie ont uni leurs voix vendredi pour réclamer une pression accrue sur le régime syrien. "Le moment est venu d'unir nos efforts pour accentuer les sanctions" contre le régime syrien, a déclaré le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, lors d'une visite à Ankara. Le ministre turc des Affaires étrangères a promis d'accroître la pression sur Damas par des sanctions économiques si le plan de la Ligue arabe, soutenu par Ankara, n'est pas accepté par le régime syrien. "Le plus important est d'accroître la pression sur la Syrie pour faire cesser le bain de sang", a déclaré le chef de la diplomatie turque.

Une résolution au vote de l'Assemblée générale de l'ONU ?

Depuis que Damas a formellement accepté le plan de la Ligue arabe, le 2 novembre, des centaines de personnes ont été tuées en Syrie, dont des civils, des déserteurs et des membres des forces de sécurité. Le gouvernement syrien explique vouloir mettre en oeuvre ce plan mais appelle les pays voisins à agir davantage pour interrompre les flux d'armes à destination de l'opposition et à mettre un terme à ce qu'il présente comme une campagne de propagande dans les médias incitant au soulèvement contre le pouvoir.

Face à ce bain de sang qui se poursuit, la Ligue arabe, qui a suspendu la Syrie cette semaine, a lancé un ultimatum à Damas : soit le régime met en application le plan de sortie de crise préparé par l'organisation panarabe, qui prévoit notamment le retrait des militaires déployés dans les villes, soit il s'exposera à des sanctions. La Ligue arabe avait alors donné trois jours au régime de Damas. L'ultimatum prend fin ce samedi sans apaisement perceptible en Syrie : les troupes syriennes ont pris d'assaut dans la matinée une localité du nord-ouest du pays, bombardée à l'artillerie lourde, après des violences qui avaient fait, la veille, 15 morts civils, dont deux enfants, tués par les forces de sécurité qui avaient tiré pour disperser des manifestations. Or, si la fin de l'ultimatum de la Ligue arabe n'expose pas la Syrie à des mesures de rétorsions très lourdes, il donne en revanche une raison supplémentaire à la communauté internationale de s'impliquer plus avant dans la crise.

Ce qui pourrait avoir lieu dès la semaine prochaine. Au siège new-yorkais des Nations unies, les Européens et plusieurs capitales arabes espèrent pouvoir alors soumettre aux voix de l'Assemblée générale de l'ONU une résolution condamnant la répression, qui aurait fait plus de 3500 morts depuis la mi-mars. Une manière de contourner le blocage au Conseil de sécurité : la Russie et la Chine avaient opposé début octobre leur veto à un projet de résolution rédigé par la France en coopération avec l'Allemagne, le Royaume-Uni et le Portugal pour condamner les violences en Syrie.

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