jeudi 28 octobre 2010

Des pistes pourraient être rouvertes dans l'affaire Bettencourt

En suspens après un imbroglio entre magistrats, les enquêtes visant l'héritière de L'Oréal Liliane Bettencourt, conflit familial au parfum de scandale politique, recèlent des bombes à retardement pour la majorité.


Dans quelques semaines, la Cour de cassation, plus haute juridiction française, transférera les dossiers à des juges indépendants d'une ou plusieurs juridictions, après avoir été saisie de la demande de "dépaysement" des procédures actuellement concentrées à Nanterre (Hauts-de-Seine).


La piste d'un éventuel financement illicite de l'UMP et de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007 va donc être reprise par un ou plusieurs juges d'instruction, avec des pouvoirs d'enquête plus étendus, notamment à l'étranger, explique-t-on de source judiciaire.


Le procureur de Nanterre Philippe Courroye ne voyait pas les éléments réunis sur ces faits comme suffisants pour des poursuites mais il aura obligation, selon le communiqué mardi de son supérieur, le procureur général Philippe Ingall-Montagnier, de verser l'ensemble des éléments d'enquête dans le périmètre d'une information judiciaire.


Il s'agit de dépositions réitérées de l'ex-comptable de Liliane Bettencourt Claire Thibout, déclarant que le gestionnaire de fortune Patrice de Maistre lui avait demandé 150.000 euros en espèces en 2007 pour la campagne électorale de Nicolas Sarkozy et lui avait dit les avoir remis à Eric Woerth, alors trésorier de la campagne et de l'UMP.


La police a vérifié les comptes bancaires de Liliane Bettencourt en France et découvert des retraits pouvant correspondre aux 50.000 euros évoqués par Claire Thibout, mais l'indice semble insuffisant, les retraits d'espèces étant nombreux et fréquents.


Malgré plusieurs déplacements en Suisse, le procureur Courroye semble n'avoir demandé aucune vérification sur le supposé retrait des 100.000 euros restants par Patrice de Maistre sur les comptes de Liliane Bettencourt. Un juge pourra demander cette vérification par commission rogatoire internationale.


LE SORT DE WOERTH TOUJOURS EN SUSPENS


Même si Eric Woerth, actuel ministre du Travail, voit s'éloigner la perspective d'une nouvelle audition, qui était prévue par le procureur de Nanterre, le transfert des enquêtes à un juge d'instruction ne lui sera pas nécessairement favorable.


Une audition sur des faits où il est mis en cause pourrait passer par une mise en examen, condition procédurale pour qu'il puisse accéder au dossier, dit-on de source judiciaire. Eric Woerth a déclaré mardi qu'il voulait rester au gouvernement après le remaniement prévu ces prochaines semaines.


Le dossier comprend aussi plusieurs dépositions d'anciens employés de Liliane Bettencourt évoquant plus largement des remises d'espèces à des hommes politiques, des faits qui n'ont pas été vérifiés en détail à ce jour.


Eric Woerth, interrogé comme témoin en juillet, doit être auditionné sur des éléments nouveaux apparus durant l'été, notamment une lettre de mars 2007 où il insistait auprès de Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur, pour que Patrice de Maistre obtienne la Légion d'honneur.


Eric Woerth, trésorier de l'UMP et ministre du Budget en 2007, recevait pour le parti des dons légaux de Liliane Bettencourt. L'épouse du ministre a été embauchée par Patrice de Maistre fin 2007. Eric Woerth a remis la Légion d'honneur à Patrice de Maistre début 2008.


Les juges saisis devront aussi examiner la fraude fiscale admise par la milliardaire, qui possédait au moins 80 millions d'euros sur des comptes en Suisse et était propriétaire au début des années 2000, via des structures off-shore, de l'île d'Arros, aux Seychelles. Une enquête a été menée en Suisse sur ce point, et les pièces devraient être transmises à la France.


Au début de l'affaire, le ministre du Budget, François Baroin, a promis un examen complet de la situation de Liliane Bettencourt, 17e fortune mondiale, qui touche depuis 2007 un chèque annuel de remboursement de l'Etat au titre du bouclier fiscal de l'ordre de 30 millions d'euros.


http://www.lepoint.fr/fil-info-reuters/des-pistes-pourraient-etre-rouvertes-dans-l-affaire-bettencourt-28-10-2010-1255630_240.php

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