mardi 3 mai 2011

Mort de Ben Laden : cinq questions sur une élimination

Est-ce la fin d’Al Qaïda ?

Non. Ben Laden, malade et réduit à se terrer depuis des années, ne jouait plus qu’un rôle marginal dans l’organisation, la véritable direction revenant au théoricien et stratège égyptien Ayman al-Zawhiri. Pour autant, et la plupart des spécialistes du terrorisme s’accordent sur ce point, Al Qaïda est aujourd’hui une organisation affaiblie, éclatée, ne comptant qu’un nombre limité de militants et aux capacités opérationnelles désormais réduites. Son étoile a pâli y compris dans le monde arabe où la jeunesse s’est massivement détournée du fondamentalisme comme elle nous le montre à l’occasion du « printemps arabe ». Cela ne veut toutefois pas dire qu’Al-Qaïda a perdu tout pouvoir de nuisance et il ne serait pas étonnant que quelques affidés cherchent à venger, dans un geste désespéré, celui qui était plus un symbole qu’un véritable chef. D’où la crainte de représailles évoquée dans de nombreuses capitales occidentales.

le désengagement en Afghanistan ?

Le secrétaire général de l’Otan, Anders Fogh Rasmussen, a beau déclarer que « les alliés et leurs partenaires continueront de mener leur mission en Afghanistan », il paraît évident que la disparition de Ben Laden risque d’avoir d’autant plus d’impact que, parmi les pays membres de la coalition, nombreux sont ceux qui s’interrogent sur l’utilité et la légitimité de leur présence sur place. Alors même que les Etats-Unis, après avoir procédé à l’envoi l’an dernier d’importants renforts, envisagent toujours de commencer à retirer des troupes avant la fin de l’année.
De surcroît, Ben Laden éliminé, les talibans afghans deviennent des interlocuteurs un peu plus présentables au moment où le gouvernement d’Hamid Karzaï affiche toujours sa volonté d’ouvrir avec eux des négociations après les avoir, hier encore, appelé à « cesser le combat ». Une solution d’ailleurs prônée par le voisin pakistanais qui a toujours soutenu en sous-main les talibans afghans, membres de l’ethnie pachtoune également très présente au « pays des purs ». Reste qu’un retrait prématuré des Occidentaux pourrait rapidement entraîner une nouvelle guerre civile, les autres ethnies afghanes refusant l’hégémonie des pachtounes, même s’ils sont majoritaires.

Quel a été le rôle des Pakistanais ?

Trouble, comme d’habitude. Il est en effet évident que la présence de Ben Laden à 80 km d’Islamabad, dans une sorte de forteresse située dans une ville - Abbottabad- essentiellement peuplée de militaires ne pouvait passer inaperçue du gouvernement pakistanais ou, au minimum, de leurs très puissants services secrets. Comme il paraît évident que l’intervention armée américaine a, au moins, reçu l’accord tacite du pouvoir. Ce qui pourrait laisser penser que Ben Laden a servi de monnaie d’échange dans l’idée de favoriser l’ouverture de négociations entre Kaboul et les talibans afghans. On sait, en effet, le pouvoir et surtout l’armée pakistanaise obsédés par la menace indienne et la peur de l’encerclement. C’est pourquoi ils ont toujours cherché à installer un pouvoir « ami » à Kaboul dans le but de se ménager cette fameuse « profondeur stratégique » qu’ils jugent indispensable en cas de conflit armé avec l’Inde. Or, pour Islamabad un pouvoir « ami » en Afghanistan est d’abord un pouvoir pachtoune, incluant la présence des talibans.

Une aubaine pour Barack Obama ?

Même si l’on doit reconnaître que la traque du terroriste avait également été conduite par la précédente administration, cette victoire conforte à l’évidence la stature du président. Surtout au moment où la campagne présidentielle s’ouvre et que son action est très contestée, de même que son patriotisme régulièrement attaqué par l’aile la plus ultra des Républicains. Enfin, le fait que Ben Laden ait trouvé la mort dans l’opération est également une bonne chose pour l’administration Obama. Le saoudien risquait de devenir un prisonnier encombrant, ne serait-ce que sur le problème de son devenir. Une condamnation à mort pouvait, en effet, le transformer en victime sinon en martyr.

Quelle influence sur le printemps arabe ?

Nulle. Pour les foules arabes soulevées contre les dictateurs Ben Laden et Al Qaïda deviennent des figures du passé. L’islamisme politique est aujourd’hui ramené à ce que fut le panarabisme, hier. A savoir une idéologie dépassée débouchant sur une impasse
http://www.leprogres.fr/politique/2011/05/03/cinq-questions-sur-une-elimination

1 commentaire:

oblomov a dit…

Il est encore plus vraisemblable que BL soit déjà mort depuis des années, Obama a choisi, pour les raisons évidentes, de monter ce canular afin de le tuer "officiellement."
http://www.oblomov.fr/?p=3335