jeudi 24 juin 2010

Otage, mon frère

Depuis six mois, Thierry Taponier attend Stéphane, son cadet, et Hervé Ghesquière, détenus en Afghanistan. Il a décidé de parler pour qu'on ne les oublie pas.
Thierry Taponier tend des photos de son frère cadet, Stéphane, journaliste à France 3, otage depuis bientôt six mois. Lui-même n'a pas un oeil pour ces images connues par coeur. A son bras gauche, au-dessus de sa montre qui égrène le temps, d'abord des jours, puis des semaines et désormais presque six mois, il porte un bracelet bleu où il est inscrit: "Libérez-les !" Une barbe clairsemée et des cheveux bruns grisonnants encadrent son visage.

Pour lui, comme pour les membres de la famille, l'enfer a commencé le 29 décembre 2009. Ce jour-là, Thierry reçoit un appel de sa mère, en pleurs. Elle lui apprend que Stéphane et son confrère Hervé Ghesquière, en reportage en Afghanistan, ont été enlevés par un groupe de taliban. Thierry assiste alors à la rencontre Montpellier Hérault Rugby-Stade français. La nouvelle le tétanise. "Pour une fois que Montpellier s'imposait", plaisante-t-il, comme si la dérision pouvait être un remède à l'inquiétude.

Favorable à un décompte quotidien

Assis sur son canapé, il raconte avec retenue l'angoisse des premiers jours, quand le téléphone sonne ; puis la "minidépression" au fil des mois. "Attendre, maintenant, c'est la seule chose à faire", soupire-t-il. Attendre, mais pas se taire. Le silence a assez duré.
Le frère du journaliste ne veut plus être "discret", comme l'avait exigé des familles le gouvernement français. Même si cela lui coûte, lui qui dit ne pas aimer parler, "encore moins être mis en avant". Derrière des lunettes noires et carrées, ses yeux marron trahissent sa stupeur lorsqu'il évoque le refus de Patrick de Carolis, patron de France Télévisions, de diffuser à l'antenne un décompte quotidien de la détention des otages. "On les montre tous les jeudis, pourquoi pas tous les jours? s'étonne Thierry. Ils ne sont pas otages que le jeudi!"

A l'initiative du comité de soutien, une centaine de mairies affichent photos et banderoles. Près de 7 000 personnes ont signé la pétition réclamant la libération des otages. Le 29 juin, Stéphane et Hervé seront retenus depuis cent quatre-vingt-deux jours. Plus que Florence Aubenas. Plus que Christian Chesnot et Georges Malbrunot. L'été sera là. D'ordinaire, à cette période, Thierry reçoit la visite de Stéphane, à Montpellier, "pour profiter des plages et des terrasses". Sans doute pas cette année. Thierry n'espère rien jusqu'à la rentrée. Sauf une mobilisation grandissante. Car, de son frère, son "meilleur ami", il n'a que peu de nouvelles. Toujours les mêmes: Stéphane est en vie et en bonne santé. Rien de plus.
http://www.lexpress.fr/actualite/societe/otage-mon-frere_901338.html

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