lundi 21 juin 2010

Une seule voix

Sylvain Chazot 21/06/10
Les joueurs de l'Équipe de France ont fait pire qu'humilier un pays dont ils portent les couleurs ; ils ont violé un rêve nommé Coupe du monde.

Et c'était le 12 juillet 1998, à la mi-temps d'une finale de Coupe du monde. « Une seule voix Lilian, une seule voix » lançait Didier Deschamps à Lilian Thuram, coupable à ses yeux d'avoir donné à Christian Karembeu des consignes différentes des siennes. Une seule voix, parce qu'au bout des mots pointait la victoire d'un groupe et d'un peuple derrière lui. Une seule voix, voilà bien ce qui manque aujourd'hui à cette dégoûtante Équipe de France.

On pourra toujours chercher les épithètes. Minables, honteux, pourris. Les joueurs tricolores sont un peu tout ça. Parce qu'ils crachent sur les valeurs avec dédain et se complaisent dans leur psychodrame puérile. Parce qu'ils humilient leur pays, en font la risée du monde en jouant les divas meurtries par un « traître ».

Mais qui sont les traîtres quand 23 joueurs oublient avec force ce qu'ils sont en train de vivre ? La Coupe du monde, quatre mots tellement symboliques pour tout gamin en âge de courir. Qu'ils s'amusent à Neuilly ou dans les quartiers nord de Marseille, ces gamins organisent tous au moins une fois leur Mondial. Ils jouent les matches et s'imaginent dans la peau de leurs joueurs préférés.

Le but survient en finale, il faut ensuite serrer les mains officielles et soulever le trophée doré. Tout ça dans les têtes parce que la Coupe du monde est un rêve. Les Bleus d'Afrique du Sud ont oublié ce moment d'enfance. Ils l'ont renié comme ils ont refusé de s'entraîner dimanche. Et le doigt d'honneur de William Gallas, asséné jeudi au journaliste David Astorga, a grandi. Il est aujourd'hui celui qu'une équipe nationale adresse au pays qu'elle représente.

On pourra toujours chercher les attributs. Déserteurs, inconscients, irrespectueux. Les joueurs tricolores sont un peu tout ça. Parce qu'ils cherchent une « taupe » quand il faudrait se battre pour regagner ne serait-ce qu'une once de dignité. Parce qu'ils n'acceptent pas le sort attribué à Nicolas Anelka, renvoyé manu-militari en Europe. L'opinion est louable. Son expression l'est beaucoup moins. Pas maintenant. La Coupe du monde est l'événement le plus regardé de la planète. Le football est universel et se passe de langue ou d'idéologie. Un tel orfèvre ne peut souffrir d'aucune irrévérence. Quand les Bleus refusent de s'entraîner en plein Mondial, ils oublient que leur maillot, sans aucune idée nauséabonde et nationaliste, les dépasse et les transcende.

On pourra toujours chercher. Les coupables et les traitres. On pourra aussi réfléchir à l'avenir en se servant du passé. Réfléchir à cette voix unique qui faisait la force de l'Équipe de France version 1998. Et réaliser que notre pays, enfant de la résistance, n'écrit ses plus belles histoires que lorsqu'il s'unit derrière sa bannière et les valeurs qu'elle transporte dans son vol.

On pourra. On attendra juste des excuses, sur le terrain et ailleurs
http://www.francesoir.fr/mondial-2010/une-seule-voix

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